Amélioration des menus des cantines scolaires de Tuléar
Madagascar est un des pays les plus pauvres du monde : près de 80 % de ses habitants vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le Sud-Ouest est le plus touché et les enfants sont les premiers à en souffrir. A Tuléar, 50 % des enfants des quartiers pauvres sont dénutris, ce qui entraine une faiblesse physique et un retard du développement intellectuel. Les carences en protéines, vitamines, minéraux, oligo-éléments entraînent des maladies spécifiques (anémie, rachitisme, scorbut, goitre, etc.) et fragilisent le système immunitaire, ce qui augmente le risque d’infections.
Depuis 2006, l’association « Les Enfants du Soleil Madagascar » (EDS https://eds-madagascar.org/) prend en charge environ 800 enfants dans 3 écoles des quartiers pauvres de Tuléar. Un repas de midi est servi dans les cantines tous les jours d’école, c’est-à-dire 5 jours sur 7 et 10 mois sur 12. Jusqu’à 2021, il était constitué d’une base de riz, haricots, et huile d’arachide avec une portion hebdomadaire de viande, et deux fois par semaine des légumes, des crudités et des fruits. Ce repas garantissait un apport en protéines végétales et en énergie correct pour un repas de midi (de 1000 à 1200 kcal /jour selon l’âge des enfants). Toutefois cette ration était insuffisante en acides gras essentiels, et en vitamines et minéraux, indispensables à la croissance et au développement intellectuel.
On voit sur la figure ci-dessus qui représente les indices de masse corporelle (IMC) quel était l’état nutritionnel des enfants de nos cantines (C1 et C2) en 2021. Malgré l’aide alimentaire que EDS fournit il y a une proportion significative d’écoliers dénutris : 3-4 % de dénutritions sévères et 10-15 % de dénutritions modérées. C’est un résultat meilleur que celui observé dans une population d’enfants du même âge non scolarisés (NS), qui montre près de 25 % d’enfants sévèrement dénutris. Mais les résultats des écoliers des cantines C1 et C2 sont moins bons que ceux des écoliers d’une école d’un quartier aisé (EPP) où il n’y a pratiquement pas de dénutritions.
Un médecin nutritionniste, le Pr Yves Michel Darmon a rejoint l’équipe médicale de EDS en 2021 et a été chargé de développer un Projet Pilote à Tuléar. Il s’agissait de déterminer si on pouvait améliorer l’état nutritionnel des enfants sans augmenter le budget alloué aux cantines.
L’impact de l’intervention serait évalué après un an du nouveau régime par une étude statistique des mensurations des enfants. Un succès se traduirait par une diminution des dénutritions qui étaient observées en 2021 (C1 et C2 sur la Figure ci-dessus).
La méthode utilisée a été de calculer le rapport Qualité Nutritionnelle/Prix de tous les aliments disponibles à Tuléar et de choisir les « têtes de liste ».
La portion de riz a été diminué au profit de celle de haricots pour augmenter l’apport en protéines, sans diminuer l’apport calorique.
Nous avons remplacé l’huile d’arachide par un mélange d’huile de soja et de tournesol, ce qui a eu pour effet d’augmenter l’apport en acides gras essentiels à courte chaîne w3 LA et w6 ALA, et d’introduire de la vitamine E.
Les légumes cuits et crus (choux, brèdes, poivrons, citrons, carottes, patates douces) et les fruits (goyaves, jujubes, oranges, fraises, papayes, melons) ont été choisis de manière à augmenter l’apport en vitamines A, B9 et C.
Le budget qui était alloué à la viande a été réparti sur une plus grande diversité de protéines animales associées à des micronutriments essentiels : sardines (vitamine B12, vitamine D et acides gras essentiels w3 à chaîne longue EPA et DHA), petits poissons séchés (calcium), rate et viande rouge (vitamine B12, fer), foie (vitamine B9, vitamine B12, fer).
L’introduction de cette diversité alimentaire devrait réduire la dénutrition et améliorer globalement la santé des enfants, mais les calculs des apports nutritionnels montrent que ce ne sera probablement pas suffisant.
Plutôt que de rechercher des financements additionnels pour acheter plus de nourriture (frais de fonctionnement, par nature limités dans le temps), nous recherchons des solutions pérennes qui ne nécessiteraient qu’un investissement de départ. Par exemple un Verger-Potager et /ou un Elevage de chèvres, qui pourraient à terme supplémenter le régime des cantines de façon optimale et assurer les frais de fonctionnement par la vente des surplus de la production.